Sénégal - La Grande Muraille Verte : un projet africain majeur de lutte contre la désertification
FORÊTS & CLIMAT - ENGAGÉ POUR UN ENVIRONNEMENT BÉNÉFIQUE À L’HOMME
Pour lutter contre la désertification, l’Union africaine a imaginé un dispositif d’envergure : la Grande Muraille Verte. Au centre de ce projet majeur, la reforestation d’une zone immense de plus de 7 600 km au cœur de l’Afrique. Au Sénégal, une structure dédiée, l’Observatoire Homme-Milieux international (OHMI) a été mise en place pour piloter le projet. A sa tête, Aliou Guissé, un écologue passionné et passionnant.
Une mobilisation panafricaine pour lutter contre la désertification
Aliou Guissé a vu naître le projet de la Grande Muraille Verte. Il le connaît par cœur. Le co-directeur de l’OHMI, par ailleurs écologue et professeur d’écologie, œuvre sans relâche pour la réussite de ce projet dont il mesure toute la portée. « Nul besoin d’être un expert pour voir que le processus de désertification progresse dans la bande du Sahel. Ce phénomène engendre une progression de la pauvreté et crée des conditions de survie particulièrement difficiles pour les populations », déplore-t-il. C’est pour faire barrage à cette progression du désert que les chefs d’États de l’Union africaine décident dès 2005 de lancer le projet emblématique de la Grande Muraille Verte. Leur idée : redonner une place à la végétation en réimplantant plusieurs espèces végétales sur une zone d’environ 7 600 km traversant 11 pays, du Sénégal à Djibouti. « C’est une vraie initiative interafricaine! Au Sénégal, l’OHMI a été créé par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), avec l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar pour encourager la Recherche autour du projet. L’Agence nationale de la Grande Muraille Verte nous accompagne également dans la mise en place des actions de reboisement. Total Foundation a rejoint le projet en 2018 », précise Aliou Guissé.

C’est une vraie initiative interafricaine !
Les populations locales au centre du projet
L’un des principaux facteurs de réussite du projet consiste à identifier les espèces végétales qui auront le plus de chance de survivre dans les conditions drastiques de la région, caractérisées par des niveaux de précipitations très faibles. « Le choix a été guidé par un double critère : l’adaptabilité d’une part, puisque les espèces choisies doivent pouvoir résister au stress hydrique, et le sociétal d’autre part. Nous avons réalisé des enquêtes auprès des populations locales pour déterminer quelles espèces leur seraient le plus utile, d’un point de vue alimentaire, médicinal mais aussi cosmétique », explique l’écologue. L’Acacia Senegal ou gommier et le Balanites aegyptiaca ou dattier du désert font partie des espèces sélectionnées. Elles permettent un reboisement pérenne et offrent également de nouvelles opportunités pour les habitants. L’un des sousprojets financé par Total Foundation consiste ainsi à mettre en place des jardins potagers exploités par les femmes, dans la région du Ferlo. « Les habitants sont des éleveurs. Lorsque nous avons évoqué l’idée de mettre en place ces jardins, ce n’était pas une évidence. Cela ne fait pas partie de leur culture. Il y avait aussi des craintes quant à l’utilisation de l’eau entre les besoins des cheptels et ceux des plantations. Il y a eu un important travail de sensibilisation », ajoute Aliou Guissé. Dans les huit jardins polyvalents de la région, des formations sont dispensées aux femmes. Et pour faciliter leur travail, un système de goutte-à-goutte est installé sur chaque parcelle. Le dispositif créé dans le village de Widou Thiengoly implique la participation de 250 femmes et leur a permis de gagner 13 400 000 FCFA1 depuis 2011, grâce à la vente de leurs fruits et légumes sur les marchés locaux.

L’ambition ne se mesure pas. Il suffit de voir très loin.
Tester, progresser et voir le plus loin possible
Si Aliou Guissé est très fier de ces résultats, il reste conscient du long chemin qui reste encore à parcourir. « Il y a des moments de découragement, quand la pluie tarde à arriver ou quand des promesses de financement n’arrivent pas. Nous manquons de moyens et la participation financière de Total Foundation dans le projet est cruciale », précise-t-il. Grâce à cette aide, un nouveau volet d’études a justement été lancé : « Jusque-là, nous plantions nos espèces indifféremment sur le territoire. Nous cherchons maintenant à catégoriser de manière plus fine les différentes natures de sol pour pouvoir planter une espèce donnée là où elle aura le plus de chances de survivre. » Des restitutions annuelles, avec les différents chercheurs associés aux projets, permettent de partager les avancées et d’identifier les points de blocage. L’ambition pour la suite ? Pour Aliou Guissé, « elle ne se mesure pas. Il suffit de voir très loin. » Il consent toutefois à dire que son équipe s’est donné pour objectif de planter des dizaines de millions d’hectares d’ici 2030 au Sénégal.
CHIFFRES CLES GRANDE MURAILLE VERTE
- 45 816 hectares reboisés entre 2008 et 2018
- 11 pays traversés, sur plus de 7 600km
- 8 jardins polyvalents exploités par les femmes dans la région du Ferlo